Alpine est une marque automobile née d’un rêve d’un garagiste visionnaire à la renaissance d’une marque légendaire. Dès sa toute première apparition en 1955, ce constructeur français a écrit quelques-unes des plus belles pages du sport automobile. Malgré un déclin qui a failli la faire disparaître à jamais, il a su renaître de ses cendres au 21e siècle. Faisons un petit retour sur l’histoire de la marque Alpine, dont le parcours est tout aussi trépidant que ses voitures de sport.
Sommaire :
Jean Rédélé, le fondateur de la marque Alpine
Né le 17 mai 1922 à Dieppe, Jean Rédélé est le fondateur de cette marque mythique française. À seulement 24 ans, il reprend la concession Renault de son père, sise à Dieppe. Passionné des compétitions automobiles dès son plus jeune âge, il lance sa carrière de pilote dans les années 1950.
Rédélé a disputé plusieurs de ses courses à bord d’une Renault 4 CV qu’il a préparé par ses soins. Son talent et sa vision l’ont mené à remporter les Mille Miles en 1952 dans la catégorie des moteurs 750 cc. En 1954, le jeune Dieppois gagne la course des Alpes, une épreuve considérée comme importante à l’époque. Il semble avoir tant apprécié cette expérience que l’année suivante, il crée sa propre société automobile qu’il nomme « Société des automobiles Alpine ». C’est ainsi que la marque Alpine tire son nom et son origine.
En 1955 sort la première Alpine, l’A106. Elle utilise la même plateforme que la Renault 4 CV, mais allégée de 100 kg. Avec seulement 32 ch et un poids plume de 500 kg, ce coach se montre vif et agile en compétition.
Les nombreuses victoires au palmarès de la marque dieppoise
Pour défier les grosses cylindrées de ses concurrents, le constructeur dieppois mise tout sur la légèreté et la compacité. Un pari osé, mais payant qui va faire d’Alpine la reine incontestée des petits bolides ultra-performants.
Dès sa sortie, la première voiture de série, la A106, commence à accumuler les victoires en rallye et en course de côte. Ce premier succès permet à la marque de s’envoler encore plus haut. L’histoire s’emballe ensuite avec l’arrivée de la A108 en 1958. Dérivée de la Renault Dauphine, cette berline s’inscrit toujours dans cette philosophie de l’allégement maximum.
C’est surtout la légendaire A110, dévoilée en 1962, qui marque définitivement les esprits et l’histoire de la marque Alpine à jamais. Pesant seulement 625 kg, cette petite merveille abrite un moteur 4-cylindres de 1,0 litre délivrant à peine 100 chevaux. Dès 1964, la A110 enchaîne les victoires en rallyes, déjouant tous les pronostics grâce à son agilité de guerrière.
Un incroyable exploit que la marque réitère en 1966 aux 24 Heures de Mans. Cette année-là, la berlinette décroche son titre aux indices énergétiques et performances, dépassant de loin les rivales autrement plus puissantes. Les prototypes M63, M64 et M65 confirment ensuite la redoutable efficacité des bolides légers et aérodynamique du constructeur français Alpine.
Toutefois, l’écurie dieppoise connaît son âge d’or en rallye. Couronnée championne d’Europe dès 1971, elle est sacrée deux ans plus tard championne du monde. Une victoire qu’elle doit aux triplées mythiques de l’A110 à Monte-Carlo. Si le fabricant a pu gravir tous les échelons, c’est grâce à l’ingéniosité de son créateur qui voulait à tout prix concevoir des voitures légères, mais ultra-performantes.
En vidéo les archives sur la légende :
Le rachat de la marque française Alpine par Renault en 1973
Malgré ses nombreux succès sportifs, le constructeur de Dieppe traverse une zone de turbulence à la fin des années 1960. En 1966, Renault et Alpine se sont déjà rapprochées. Cependant, en 1971, une grève paralyse l’entreprise. Pour assurer sa survie, Jean Rédélé s’est vu céder 40 % des parts à Renault en 1973. Ce rachat partiel tombe à point nommé pour les deux marques, dira-t-on.
De son côté, la marque au losange s’offre une griffe sportive qui consolide son image et lui permet de proposer des modèles plus prestigieux. De l’autre, Alpine bénéficie de tous les financements vitaux pour poursuivre son développement. Concrètement, le fait de reprendre la firme dieppoise offre à Renault un accès direct à son savoir-faire en matière de légèreté, d’allégement et d’aérodynamisme. Comme on le sait tous, ce sont les compétences clés de Rédélé pour concevoir ses voitures.
Les premiers fruits de cette union gagnant-gagnant ne se font pas attendre. Dès 1975, Renault Alpine développe la A442, un prototype de course propulsé par un V6 turbo de 500 chevaux. Cette voiture remporte les 24 Heures de Mans en 1978.
La tentative de relance sur le marché des voitures de sport avec l’A310
Après que Renault a obtenu une belle part en 1973, Alpine tente un retour sur le marché des sportives. C’était l’A310, présentée en 1976, son fer de lance. Ce coupé GT abrite un moteur V6 et doit succéder à la légendaire A110, mais avec un positionnement plus haut de gamme. Il met aussi l’accent sur le confort pour séduire une nouvelle clientèle de passionnés.
Un gros enjeu pour la marque dieppoise. Elle se doit de prouver sa capacité à produire des voitures de routes modernes et raffinées, au-delà de ses modèles de compétition. Malheureusement, le lancement est si précipité que cela a entraîné des problèmes de finition et de fiabilité. Ceux-ci ternissent bien évidemment l’image de l’A310. Malgré d’indéniables qualités dynamiques, la petite merveille peine à s’imposer face à sa principale rivale, la Porsche 911. Par ailleurs, les crises pétrolières plombent le marché et ne résolvent rien.
Alpine échoue dans sa tentative de relance, mais perpétue son mythe de constructeur de voitures de course. L’A310 est certes un échec commercial, mais est aussi salvateur. Elle va jeter les bases de l’innovation technique et du design qui marqueront les futurs modèles de la firme de Dieppe.
Le déclin d’Alpine dans les années 1990
Dans les années 90, plusieurs facteurs se sont conjugués pour provoquer le déclin de la marque Alpine sur le marché automobile. D’abord, les difficultés financières de Renault à cette époque limitent les investissements pour développer de nouveaux modèles sportifs.Ensuite, la réglementation environnementale se durcit avec de strictes normes antipollution. Cela rend les sportives compactes et performantes du constructeur moins adaptées.
Parallèlement, la demande du marché évolue et cela va impacter son histoire. Les consommateurs délaissent les petites sportives au profit des monospaces, 4×4 et berlines familiales plus spacieuses. L’arrivée des concurrents plus puissants, plus technologiques et mieux équipés y contribue, d’autant plus qu’ils bénéficient de budgets marketing conséquents.
Avec des modèles vieillissants, un cadre réglementaire et une demande défavorable, sans parler des rivaux plus redoutables, Alpine peine à rester compétitive. À défaut des ressources financières, la firme au losange finit par mettre à terme la production des voitures Alpine en 1995, juste après la fin de carrière de l’A610.
La renaissance de la mythique marque Alpine au 21e siècle
Après près de 20 ans d’absence, la firme de Dieppe renaît de ses cendres en 2017. Son fer de lance est le retour de la légendaire A110. En réalité, Renault avait préparé le terrain dès 2012 en dévoilant le concept-car A110-50. C’est avec cette voiture dérivée de la Renault DeZir que le constructeur au losange annonce son intention de relancer la marque dieppoise.
Présentée à Monaco, la nouvelle A110 réinterprète les codes de la berlinette des années 60-70. Cela concerne autant son design, son poids plume (1 100 kg) que son petit moteur de 1,8 litre turbo de 252 chevaux. Une édition limitée, baptisée Première Édition, est même prévue pour 1955 exemplaires pour faire référence à l’année de la naissance d’Alpine.
Saluée par le média pour son agilité et son plaisir de conduite, l’A110 nouvelle génération signe le retour d’Alpine. Ce dernier multiplie rapidement les déclinaisons pour séduire toutes les passionnées, mais aussi pour étoffer la gamme. C’est une tendance très prisée des constructeurs quand un modèle se vend très bien. On trouve alors l’A110 Pure, puis l’A110 Légende qui est la mieux équipée de toutes, sans parler des variantes sportives affûtées.
L’A110 S gagne quelques chevaux et un châssis raffermi, mais c’est l’A110 R qui est la plus radicale de la série. Elle incarne même l’esprit de la compétition et arbore la fameuse teinte bleue emblématique de l’histoire de la marque Alpine. Cette petite merveille de 300 chevaux affiche des appendices aérodynamiques et sera proposée en 500 unités seulement. Alpine et Renault vont loin et commercialise une Alpine édition Fernando Alonso, basée sur l’A110 R et limitée à 32 exemplaires.
Le retour de la marque française Alpine dans la compétition automobile
Pour Renault, la renaissance de cette marque légendaire s’inscrit dans une stratégie globale et ambitieuse. C’est loin d’un simple retour aux sources. Il s’agit plutôt de repositionner le losange sur le créneau sportif et haut de gamme. Un pari qui passe d’abord par le renforcement du portefeuille de la marque de Boulogne-Billancourt avec des modèles prestigieux et performants.
On assiste également à un mouvement inverse de celui des années 70. À l’époque, le nom de Renault avait fini par remplacer celui d’Alpine, comme pour la Renault Alpine A442 ou la Renault Spider. Celui-ci n’est autre qu’un roadster inspiré de l’Alpine A220. Aujourd’hui, c’est le logo A fièrement campé et va apparaître sur tous les modèles sportifs. D’ailleurs, l’appellation Renault Sport a été remplacée par Alpine dès 2019. On retrouve même l’emblème A sur certains SUV comme le Renault Austral ou sur la nouvelle citadine Renault Clio Esprit Alpine. Disons que c’est un avant-goût de ce que pourraient être les futurs Alpine électriques.
Surtout, Alpine ne compte pas s’arrêter aux simples voitures de route. Elle ambitionne aussi de renouer avec son prestigieux passé de compétitrice. Son retour en force s’illustre déjà en formule 1 comme en endurance, autant des terres d’exploits mythiques pour Alpine. Cette renaissance n’est donc qu’un tremplin pour Renault. En offrant une véritable aura sportive et premium, Alpine permettra au losange de conquérir une nouvelle dimension. Régénérer un mythe étincelant pour mieux se réinventer, telle est l’équation gagnante de Stellantis, le groupe mère de Renault.